Alain, séance 1 - La Belle et la Bête
- Fabrice LAUDRIN
- 4 févr.
- 12 min de lecture
Dernière mise à jour : 11 févr.

Lundi 13h15 – Brouillard et camembert
Le brouillard ne lâche rien. Pont-Aven, englué dans sa brume, ressemble à un village suspendu, comme si le temps avait décidé de faire une pause. Je quitte le Café du Centre, le goût du camembert au four encore accroché au palais, un plat aussi réconfortant que les galettes de mon enfance. À croire qu’ici, on combat l’humidité avec du gras.
Je suis en train de boutonner mon manteau quand j’entends une voix familière me saluer : Philomène, l’une des guides conférencières du musée. Une jeune femme vive, toujours dans l’action, le genre à systématiquement vous coincer avec une bonne nouvelle qu’on n’a pas vu venir.
« Alors, François, j’ai hâte de recevoir ta fille en stage la semaine prochaine ! ».
Ma fille ? Je la regarde, légèrement pris au dépourvu, mais je fais bonne figure. Ah, oui, le fameux stage de 3e. Elle m’en avait vaguement parlé entre deux portes, mais visiblement, c’était plus qu’un projet.
« Bien sûr, bien sûr, dis-je en hochant la tête comme si je le savais déjà. Merci de l’accueillir. Elle adore les musées et aura probablement pas mal de questions à te poser sur une poignée de tableaux. »
Un petit mensonge pour la route. Je ne suis pas sûr qu’elle "adore" les musées, mais bon, ça fait toujours bien. La guide sourit, visiblement ravie. Elle s’éclipse avec un petit signe de la main, et me laisse là, sur les pavés luisants, seul avec cette nouvelle.
Au musée. À Pont-Aven, de surcroît. Ma fille, quinze ans à peine, en train de poser les premières pierres de son indépendance. Une adolescente en quête de nouveaux horizons, de nouvelles règles. Je repense à ces derniers mois, à son regard plus vif, à ses silences plus longs. Ce n’est pas qu’elle se dérobe, non, c’est qu’elle cherche ailleurs. Loin de nous, loin de moi.
« Un beau cas de résolution d’Œdipe, tiens. »
Je me fais la réflexion en esquissant un sourire. C’est un classique : elle cherche des lois ailleurs, là où le père n’a pas encore planté son drapeau. Le musée, je l’aime bien, mais ma famille et moi n’y émargeons qu’en « amis du musée », sans plus, pour bénéficier des entrées gratuites et des conférences. Ça devrait me réjouir, non ? Une victoire, en quelque sorte. Elle ne reste pas accrochée à mes basques, elle avance.
Et pourtant, un truc me serre à l’intérieur. Pas de la tristesse, pas vraiment. Une sorte de mélange entre fierté et vertige. « C’est ça, devenir parent d’une ado : la voir déployer ses ailes pendant que vous vous accrochez à votre chaise. »
Je remonte lentement la rue des Meunières vers le cabinet. Le brouillard étouffe tout, même les bruits de la rivière. Je devine à peine les toits des maisons, et je me dis que c’est exactement ce que je ressens. Elle avance dans une direction que je ne vois pas encore. Un brouillard pour elle, un autre pour moi.
Je pousse la porte du cabinet. L’air est plus sec à l’intérieur, mais le silence est le même. Je dépose manteau et écharpe sur la patère. Je pourrais me faire un café, mais non. Mon esprit est encore ailleurs, avec ma fille, à imaginer ce qu’elle peut bien attendre de ce stage.
Je secoue la tête pour chasser cette mélancolie latente. Il est 13h30. La journée continue. Le sofa m’attend, et avec lui, une autre histoire qui n’est pas la mienne.
13h30 – La Bête frappe à la porte
Mes notes sont étalées devant moi, un peu de travers sur la petite table en marbre. Alain, 40 ans. Célibataire, contremaître dans l’usine de gâteaux bretons qui parfume le haut du village de beurre salé les jours de vent. Un homme massif, mais discret, presque effacé. Chaque séance est une lutte silencieuse pour arracher quelque chose à son mutisme. Venir, ou plutôt se préparer à venir ici, semble difficile pour lui. Les séances sont souvent annulées quelques minutes avant l’heure du rendez-vous.
Reflet, Contrôle, Vide, ces trois mots de fin de la dernière séance me fixent. Trois petits cailloux laissés sur le chemin, mais qui, pour lui, sont des montagnes. Je repense à ce miroir qu’il a évoqué, presque à contrecœur. Une brocante, un objet fissuré qu’il a ramené chez lui sans savoir pourquoi. « Je ne sais pas pourquoi je l’ai acheté. Il me dérange. ». C’était tout ce qu’il avait dit. Rien de plus. Mais son regard, lui, en disait long.
Je m’appuie contre le dossier de mon fauteuil, mes pensées dérivant entre ses mots et les silences qui les entourent. Alain, c’est un peu comme c’est bien entendu ce miroir fissuré. Une façade solide, presque brutale, mais derrière, des failles. Des lézardes qu’il refuse de voir ou qu’il ne sait pas comment affronter.
Une image me revient de la dernière séance : ses mains. Énormes, calleuses, maladroites. Des mains faites pour construire, mais qui trahissent quelque chose de plus primal, de plus dangereux. Une tension entre le contrôle qu’il impose et le chaos qu’il contient.
Une ombre hésite devant la porte vitrée. Il est là. Il frappe à la porte. Je laisse les notes sur la table et me lève pour aller ouvrir.
Il entre, massif, les épaules voûtées comme s’il portait le poids du monde. Son manteau est mouillé par la brume, et il sent légèrement le tabac froid. Il ne dit rien, comme d’habitude, se contente d’un hochement de tête. Je referme la porte derrière lui, le bruit résonne comme les trois coups d’une nouvelle représentation de théatre.
Je l’observe s’installer. C’est toujours le même rituel : il hésite un instant, puis choisit la chaise au lieu du divan, comme s’il craignait de se laisser aller. Ses gestes sont lents, presque calculés, mais je devine une nervosité sous-jacente.
— Bonjour, Alain, dis-je, simplement.
Il répond d’un murmure, un “Bonjour” à peine audible. Il ajuste les manches de son pull, un geste qu’il répète souvent, comme pour se donner contenance.
Le silence s’installe. Pas un silence vide, non. Un silence lourd, presque palpable. Je le laisse durer, comme une invitation à parler. Il finit par lever les yeux, évite mon regard, puis lâche :
— Je n’ai pas annulé cette fois.
Une phrase simple, mais lourde de sens.
— Non, en effet. Vous êtes là. Et ce n’est pas rien, semble-t-il.
Un léger rictus traverse son visage. Pas un sourire, mais quelque chose qui s’en rapproche.
— La semaine a été compliquée, reprend-il, hésitant.
Il ajuste à nouveau ses manches, regarde ses mains, puis le sol. Je le laisse venir, ne posant aucune question pour l’instant. Je sens qu’il tourne autour de quelque chose, comme toujours.
— Le miroir, murmure-t-il finalement.
Je me redresse légèrement, mais reste immobile.
— Ce fameux miroir fissuré ?
Il acquiesce, toujours sans me regarder.
— Je l’ai déplacé, dit-il après un temps. Je n’arrêtais pas de le croiser. Ça m’agaçait.
Je le sens tendu, comme s’il cherchait les mots justes.
— Et maintenant ?
— Maintenant… il est dans un coin. Mais c’est pire. Je sais qu’il est là, et… je ne sais pas. J’ai l’impression qu’il me regarde, alors que c’est censé être l’inverse.
Je hoche doucement la tête.
13h40
Je laisse le silence s’étirer, juste assez pour qu’il trouve ça inconfortable sans se braquer. Puis je décide d’aller chercher dans les débris qu’il a laissés la dernière fois.
— Alain, vous vous souvenez des trois mots qu’on a posés la dernière fois ?
Il lève légèrement la tête, l’air surpris.
— Je crois… c’était… "Reflet, contrôle, vide", non ?
— Exactement. Reflet, contrôle, vide. Pourquoi ces mots, à votre avis ?
Il pince les lèvres, réfléchit, mais ne répond pas tout de suite. Ce n’est pas qu’il ne sait pas, c’est qu’il ne veut pas dire.
— Probablement le miroir, finit-il par murmurer
Ce miroir fissuré revient comme un refrain. Je décide de le pousser un peu plus loin.
— Vous m’avez dit qu’il vous dérangeait. Vous vous souvenez pourquoi ?
Un silence. Je vois ses mains se crisper légèrement sur ses genoux. Il finit par répondre, presque à contrecœur :
— Parce que… quand je le regarde, je ne me reconnais pas.
Sa voix est basse, mais le poids de cette phrase est immense. Je le laisse là un instant, avec ses propres mots.
— Qu’est-ce que vous voyez, alors, quand vous regardez ce miroir ?
Il détourne les yeux, comme pour fuir la question.
— Je ne sais pas… Une image… déformée. Quelque chose qui n’est pas moi.
— Ou quelque chose que vous ne voulez pas voir ?
Cette fois, il relève brusquement la tête, comme si mes mots avaient touché un point sensible. Je vois dans son regard une étincelle, un mélange de colère et de surprise.
— Je ne suis pas un monstre, lâche-t-il, presque agressif.
— Personne n’a dit que vous l’étiez, Alain. Mais vous, est-ce que vous vous le dites parfois ?
Un silence tendu. Ses mains lâchent enfin son pull, mais elles restent crispées sur ses genoux.
— Quand je regarde ce miroir… je vois quelqu’un qui ne devrait pas être là.
Sa voix se brise légèrement sur la fin de la phrase. Il détourne à nouveau le regard, comme s’il avait dit quelque chose qu’il n’aurait pas dû.
Je laisse passer quelques secondes avant de répondre, doucement :
— Peut-être que ce n’est pas la personne dans le miroir qui ne devrait pas être là. Peut-être que c’est le miroir lui-même.
Il me regarde, perplexe. Je vois qu’il essaie de comprendre, mais qu’il lutte.
— Vous voulez dire quoi, exactement ?
— Que ce miroir, ce reflet, ne dit pas toute la vérité. Il ne montre qu’une partie de vous, Alain. Et si cette partie vous dérange, peut-être que ce n’est pas parce qu’elle est fausse, mais parce qu’elle est incomplète. Autrement dit que le miroir ne vous voit pas sous le bon angle, qu’il n’est pas à la bonne place.
Il reste silencieux, mais je sens que quelque chose bouge en lui. Une idée qui commence à germer, même s’il ne veut pas encore la regarder en face.
Je décide de ne pas pousser plus loin pour l’instant. Il y a une fragilité dans son silence, et je sais qu’il faut parfois laisser les choses mûrir avant d’y revenir.
— Reflet, contrôle, vide, je reprends doucement. Peut-être que ce miroir fissuré vous montre ce que vous voulez contrôler et ce que vous évitez de voir. Ce vide que vous ressentez, il vient peut-être de là.
Il ne répond pas, mais je vois sa mâchoire se serrer légèrement. Une résistance, mais pas un rejet complet.
Je jette un coup d’œil à l’horloge. Le temps file, mais il reste encore assez pour creuser un peu plus. Pour l’instant, Alain est comme ce miroir fissuré : fragile, mais toujours debout. Et moi, je dois trouver comment l’aider à regarder ses propres éclats sans détourner les yeux.
14h00
Pendant de longues minutes, Alain reste figé. Il est toujours là, rivé à sa chaise comme un naufragé à une planche de salut. Ses mains, désormais immobiles, reposent sur ses cuisses, mais leurs jointures blanches racontent une autre histoire. La tension est là, tapie juste sous la surface.
— Ce vide dans la fissure dont vous parlez, Alain. Comment se manifeste-t-il, au quotidien ?
Il réfléchit un instant, puis secoue la tête.
— Je ne sais pas. C’est pas vraiment un truc que je ressens tout le temps. C’est… c’est comme une absence, parfois.
— Une absence de quoi ?
Il hausse les épaules, visiblement agacé.
— Je sais pas. De… moi, peut-être.
Sa réponse tombe comme une pierre dans un puits. Je la laisse résonner un moment avant de reprendre.
— Et ce miroir… est-ce qu’il reflète cette absence ?
— Non, dit-il rapidement. Non, il me montre juste… quelque chose qui cloche. »
— Quelque chose qui cloche ? Vous voulez dire quelque chose qui ne correspond pas ?
Il hoche la tête, presque imperceptiblement.
— Oui. Comme si… ce que je vois là-dedans, ce n’est pas ce que je devrais être.
Voilà, on y est. Le miroir fissuré n’est pas qu’un objet. C’est une métaphore, une clé pour ouvrir une porte qu’il garde fermée à double tour.
— Qu’est-ce que vous pensez que vous "devriez être", Alain ?
Il relève brusquement la tête. Son regard croise le mien, et pour la première fois, il ne détourne pas les yeux.
— Je sais pas. Quelqu’un de… mieux. Plus fort. Quelqu’un qui… contrôle.
— Qui contrôle quoi ?
— Tout.
Un mot, lourd de sens. Je sens la colère monter en lui, pas dirigée contre moi, mais contre lui-même.
— Vous avez l’impression de ne rien contrôler ?
Il hésite, puis lâche dans un souffle :
— Parfois, oui.
Un aveu. Pas grand-chose, mais dans sa bouche, c’est énorme.
— Alain, vous êtes contremaître, n’est-ce pas ? Vous êtes le premier à savoir que le contrôle c’est une illusion. On passe notre vie à essayer de tout maîtriser, sa vie, ses équipes, mais au fond, c’est impossible. Ce miroir, il ne vous demande pas de contrôler ce qu’il reflète. Il vous demande juste de regarder.
Il serre les mâchoires, visiblement peu convaincu.
— Facile à dire, mais regarder quoi ? Un truc qui vous donne envie de tout casser ou de botter le cul à quelqu’un qui bosse mal ?
— Peut-être que casser, ce n’est pas la solution. Peut-être qu’il faut apprendre à vivre avec les fissures.
Il se renfrogne, mais je sens qu’il réfléchit.
— Vous savez, Alain, les fissures, ça laisse passer la lumière.
Une phrase un peu cliché, peut-être, mais elle a le mérite de le faire tiquer.
— Vous dites ça comme si c’était beau, grogne-t-il. »
— Ce n’est pas beau, c’est humain.
Un silence s’installe. Il se passe quelque chose dans son regard. Une prise de conscience, ou peut-être juste une pause dans son combat intérieur.
— Vous pensez que c’est possible, vraiment ?
— Pas d’un coup. Pas tout seul. Mais oui, c’est possible.
Il hoche la tête, doucement cette fois. Je vois ses épaules se relâcher légèrement.
14h20
Le temps file, et je sens que la séance touche à sa fin. Alain a encore des choses à dire, mais il n’est pas prêt à les laisser sortir aujourd’hui. Et ce n’est pas grave. Les éclats du miroir sont là, à découvert. Il faut maintenant les laisser reposer, voir comment ils s’agencent dans son esprit.
Je décide de revenir à l’essentiel.
— Alors, Alain, si vous deviez garder trois mots de cette séance, lesquels choisiriez-vous ?
Il réfléchit longuement, puis répond :
— Fissures… lumière… et… absence.
Je note ses mots, mais je ne dis rien. Ce sera pour la prochaine fois.
Il se lève, remet son manteau, toujours avec cette lenteur calculée. À la porte, il hésite un instant, puis se retourne.
— Vous savez, ce miroir… je crois que je vais le remettre en place.
— Bonne idée, dis-je avec un sourire. On ne répare pas les fissures en les cachant.
Il me lance un dernier regard, presque gêné, avant de disparaître dans le brouillard. La Bête s’éloigne, un peu moins lourde, un peu moins seule.
14h30
La porte du cabinet claque doucement derrière Alain, et le silence retombe. Un silence différent, plus léger, mais encore chargé de tout ce qui n’a pas été dit. Je reste un instant immobile, les yeux fixés sur la chaise qu’il occupait, comme si elle portait encore l’écho de ses mots.
— Fissures, lumière, absence.
Je murmure ces trois mots pour moi-même, les laissant flotter dans l’air comme une fumée qui cherche à s’élever. Des mots simples, mais qui disent tout. Des mots comme des éclats d’un miroir brisé, des morceaux qui refusent encore de s’assembler.
Je repense à ses mains, à sa manière de serrer les poings comme s’il voulait contenir tout un monde en train de s’effondrer. Le contrôle, ce foutu contrôle. Alain en a fait son bouclier, mais c’est aussi sa prison. Et ce miroir fissuré, il le déteste autant qu’il en a besoin.
« Les fissures, ça laisse passer la lumière. »
C’était facile à dire. Une jolie phrase. Mais en regardant ce brouillard, je me demande si c’est vrai. Peut-être qu’il faut autre chose qu’un rayon de lumière pour traverser une vie éclatée en morceaux. Peut-être qu’il faut du courage. Ou une bonne dose de folie.
Je retourne à mon bureau, pousse les notes d’Alain sur le côté. Ma tasse de café est vide, encore une fois. Je pourrais en refaire, mais à quoi bon ? Il y a quelque chose de plus pressant.
Je m’assois et reste là un instant, le regard dans le vague. La Bête et son miroir, non c’était la Belle et la Bête. Ce conte tourne dans ma tête, pas seulement à cause d’Alain, mais parce que, comme toujours, les histoires des autres ont cette façon de s’entrelacer avec les nôtres. Il manque encore l’élément principal, la Belle. Je sais qu’on y viendra rapidement.
La Bête regarde son reflet et voit un monstre. Mais est-ce vraiment ce qu’elle est ?
Je pense à Alain et à sa forteresse mentale, ce lieu froid et isolé où il s’enferme pour ne pas affronter l’Autre. À sa colère, qui gronde comme une tempête, prête à tout emporter. Et à ce miroir, qu’il a déplacé, caché, mais jamais détruit. Parce qu’au fond, il sait qu’il en a besoin.
Le miroir, c’est l’Autre. Celui qui nous regarde, qui nous confronte à ce qu’on est, et pas seulement à ce qu’on voudrait être. Alain évite ce miroir parce qu’il refuse de voir ses fissures. Mais ces fissures, elles sont là. Elles racontent son histoire, ses échecs, ses doutes. Elles sont lui.
Un soupir. Je prends mes notes, griffonne quelques pensées pour ne pas les perdre. Ce miroir fissuré, c’est une métaphore parfaite, mais terriblement douloureuse. On ne peut pas s’en débarrasser sans s’abandonner à un vide encore plus grand.
Je pense à ma propre vie, à ces moments où j’ai évité mes propres miroirs. La Bretagne, ce retour ici. Ce cabinet. Peut-être que tout ça, c’est mon miroir à moi.
14h45.
L’horloge me rappelle que le prochain patient arrive dans quelques minutes. Je ferme le dossier d’Alain, me lève pour aller me rincer le visage. Devant le miroir de la salle d’eau, je m’arrête un instant. Il n’est pas fissuré, le mien, mais il reflète une vérité que je ne peux pas toujours fuir.
Je regarde mon propre reflet, et pour une seconde, je me demande : Qu’est-ce qu’Alain aurait vu, à ma place ?