Leclerc, J. (2005). Art et psychanalyse : Pour une pensée de l’atteinte. Presses de l’Université du Québec.
- Fabrice LAUDRIN

- 25 févr.
- 3 min de lecture

Dans Art et psychanalyse : Pour une pensée de l’atteinte (2005), Josée Leclerc interroge la création artistique à partir d’un concept central : l’atteinte. Loin d’être une simple blessure ou un trauma figé, l’atteinte est un point de rupture, un seuil où l’artiste est confronté à une faille, à une perte ou à une transformation. C’est une brèche où l’inconscient s’infiltre, où le sujet vacille et où l’œuvre advient dans cet espace de tension entre maîtrise et débordement.
L’auteure mobilise la psychanalyse freudienne et lacanienne pour explorer cette notion. Elle montre comment, à travers l’acte créatif, l’artiste ne cherche pas à représenter un vécu, mais à inscrire un manque, à contourner l’indicible. L’art devient alors une forme d’écriture du seuil, une manière de matérialiser ce qui échappe au langage, d’inscrire un réel impossible à symboliser autrement.
Le livre analyse différentes figures de l’atteinte chez plusieurs artistes, en mettant en lumière comment le geste artistique surgit dans une dynamique de répétition, de transformation et de résistance. L’atteinte n’est pas seulement une expérience subjective : elle se manifeste dans la matière même de l’œuvre, dans les couleurs, les ruptures de formes, les traces laissées par le processus créatif.
Relation avec la Psychanalyse du Seuil
Ce concept d’atteinte résonne directement avec la Psychanalyse du Seuil, qui interroge les espaces de passage, les zones de tension entre absence et présence, entre visible et invisible.
L’atteinte comme expérience du seuil
L’atteinte est un moment de bascule, où l’artiste se trouve en suspension, face à un vide structurant. Dans la Psychanalyse du Seuil, nous considérons que cette rencontre avec le vide n’est pas une impasse, mais une ouverture. L’œuvre naît dans cet entre-deux, où le sujet traverse une zone de transformation psychique et esthétique.
L’image et l’écriture comme inscription du seuil
Leclerc met en évidence la manière dont l’image et l’écriture sont des lieux où le seuil s’inscrit. L’artiste, en créant, n’essaie pas de figer un sens, mais de rendre perceptible une absence, une béance. Ce que nous appelons l’interstice dans la Psychanalyse du Seuil se retrouve dans cette idée : l’œuvre ne se donne jamais totalement, elle laisse une place vide, une énigme, un passage non résolu qui engage le spectateur dans un processus d’interprétation et de résonance subjective.
L’artiste comme sujet du seuil
Les artistes étudiés par Leclerc ne sont pas de simples créateurs d’images ou de formes : ils habitent une frontière, celle de l’expérience intime qui déborde et se traduit en traces perceptibles. Ils sont passeurs d’atteinte, traversant des espaces psychiques où le visible et l’invisible se croisent. Dans la Psychanalyse du Seuil, nous mettons l’accent sur ce rôle du passeur, celui qui transforme un vécu informe en une expérience transmise, en un espace de rencontre avec l’Autre.
Un ouvrage fondamental pour penser la création comme expérience du seuil
Art et psychanalyse : Pour une pensée de l’atteinte est une contribution essentielle pour ceux qui veulent comprendre comment l’art et la psychanalyse se rejoignent dans une dynamique d’exploration du vide, du manque et du passage.
Dans une perspective de Psychanalyse du Seuil, ce livre nous permet de penser l’œuvre d’art non pas comme un objet achevé, mais comme un processus actif, une zone de transformation où l’artiste inscrit une absence, où il négocie avec une faille.
Ce texte éclaire la manière dont l’art nous confronte à des zones de rupture, à des seuils existentiels, et comment la psychanalyse peut aider à décrypter ces espaces d’entre-deux, où le sujet vacille et se réinvente. Un ouvrage essentiel pour les artistes, les analystes et ceux qui interrogent l’art comme une expérience de passage, une écriture du seuil.
Courte biographie de Josée Leclerc
Josée Leclerc est professeure agrégée au Département de thérapie par les arts de l'Université Concordia à Montréal. Titulaire d'une maîtrise en art-thérapie et d'un doctorat en sémiologie, elle a orienté ses recherches vers l'intersection entre l'art et la psychanalyse, avec un intérêt particulier pour les expériences traumatiques et leur expression artistique. Leclerc a publié plusieurs ouvrages et articles sur ces thématiques, contribuant significativement au développement de l'art-thérapie et à la compréhension des processus créatifs en lien avec le trauma.
Notice bibliographique
Leclerc, J. (2005). Art et psychanalyse : Pour une pensée de l’atteinte. Presses de l’Université du Québec.



